Si le chanteur John Lennon ou le célèbre écrivain néerlandais Harry Mulisch avaient été mon oncle, les choses n’auraient pas été essentiellement différentes. Mon oncle Carl Joseph Gellings (6 mars 1930 – 7 juin 2015) fut une personnalité d’artiste, riche en couleurs, pour ne pas dire: flamboyante.
Grand dessinateur et grand couturier, il avait la particularité de dessiner des mannequins dotés d’une seule jambe et souvent borgne (ce qui n’enlevait d’ailleurs rien à leur grâce). Rien de terne ni de gris chez lui; pourtant certains le surnommaient le « vieux pigeon voyageur gris ». Pour lui et sur lui j’ai écrit le poème suivant, lu à son enterrement le samedi 13 juin 2015 au cimetière de Couze (Dordogne).
A LA MORT DU VIEUX PIGEON VOYAGEUR
Grand oiseau dormant calmement, presque revenu
à son noyau, presque détachée de sa dépouille
enflammée, son plumage, son corps
Un sourire se dessine sur sa bouche comme si
les yeux clos derrière ses lunettes
il regardait d’une immense hauteur dans
une vallée de nombreuses années
Son grand amour : une fée en robe de gala
un diadème dans une tourelle
de cheveux incandescents
leur nid plein d’enfants non loin du port
son port à lui, la ville et la nuit qu’il traversait
avec elle en volant, dansant et faisant la fête
Je revois toujours les beautés unijambistes qu’il créait
s’échapper de ses feuilles et défiler
en gracieuse procession
je revois toujours tout ce que je souhaite que lui
voie aussi dans son sommeil si profond
Ici dans le pays où il était enfin arrivé
où il a vu, vaincu, mais perdu son grand amour
dont le départ fut si lourd et on voit le sourire
sur le visage de l’oiseau prendre la forme
du baiser des retrouvailles
PG